C'est inévitable, être un entraîneur-chef vient avec de la pression. Devenir un nouvel entraîneur-chef vient avec de la pression et de l'inconnu. Devenir un nouvel entraîneur-chef d’une équipe ui avait une culture inadéquate vient avec de la pression, de l'inconnu, et de la résistance… comme si prendre en charge un club n'était pas déjà assez difficile.
Alors, comment devrait-on s'y prendre pour changer la culture de son équipe quand on entre en poste?
La question me vient d'un entraîneur-chef de volleyball qui est confronté à un climat sous-optimal : climat entre les athlètes qui est centré sur l'égo, résistance au changement de l'administration, et j'en passe.
Changer la culture pose son lot de défis, qui sont amplifiés par notre désir de vouloir tout changer dès le premier jour du camp d'entraînement. C'est louable. Toutefois, c'est une illusion de penser qu'on peut changer les comportements et les croyances d'une équipe en une semaine.
Est-ce que vous êtes capable de changer vos habitudes de vie des dix dernières années en une semaine? Non. Imaginez quand ça implique des dizaines d’athlètes. En fait, on surestime ce qu’on peut faire en une journée et on sous-estime ce qu'on peut faire en un an (Bloom, 2022).
Toutes les équipes viennent avec un bagage, avec un historique. Alors, sauf dans le cas très rare d'une équipe d'expansion, il faut être patient et persévérant pour changer la culture…
Que doit-on faire pour changer la culture d'une équipe?
Mon expérience combiné à la littérature (Logan et al., 2008; Kotter, 1996; Sinek, 2019) m'amène à décomposer le processus en quatre étapes.
1. Créer un sentiment d'urgence
La première étape est de créer un sentiment d'urgence. Pourquoi est-ce que c'est si important de changer? Et… Pourquoi MAINTENANT? La dernière partie est cruciale. Ça prend une raison qui stimule le collectif (lire tous les joueurs de l'équipe) à changer leurs comportements pour le bien de l'équipe. Ça prend aussi une raison qui stimule l'individu (lire chaque joueur de l'équipe) à changer leurs comportements pour le bien de leur carrière. Mettez-vous dans la peau d'un athlète : Pourquoi est-ce que je devrais bien me forcer et faire différemment si ça ne change rien pour moi? Ça peut être aussi simple que de nommer le fait que les joueurs qui gagnent des championnats augmentent, généralement, leur valeur sur le marché des agents libres.
2. Former un groupe de premiers suiveurs
La deuxième étape est de former un groupe de leadership des personnes les plus influentes dans votre équipe. Pas les personnes que vous pensez influentes. Celles qui le sont. Si on veut que les choses changent, on a besoin d'alliés et ce sont les premiers suiveurs qui ont le plus d'influence, pas le leader. Ce sont les premiers suiveurs - les personnes qui décident de suivre le leader (c.-à-d., l'entraîneur-chef) et qui vont peut-être amener le reste de l'équipe à suivre. La tâche du leader, dans ce cas, est d'identifier ces personnes et de leur donner du pouvoir. Une façon simple de les engager dans ce processus est de reconnaître publiquement leurs contributions ou de les inviter à des rencontres du groupe de leadership.
3. Développer une vision inspirante
La troisième étape est de développer une vision claire et de la marteler. Un grand leader d'une organisation sportive m'a d'ailleurs déjà partagé : Si tu n'as pas répété ta vision 10 fois, tu ne l'as pas dite une fois. Est-ce que tu l'as dite assez souvent? Est-ce que tu l'as dite souvent dans des termes simples et évocateurs? Comme rien n'est mieux que le test du terrain, la prochaine étape est de tester cette phrase évocatrice avec ton groupe de leadership de façon informelle. À chaque fois, tu as la chance d'ajuster ton message selon la façon dont c'est reçu.
4. Célébrer les petites victoires
La quatrième étape, et la dernière dans ce cas-ci, est celle qui va vraiment t'aider à combattre l'inertie. Lorsque tu as développé ta vision et que tu l'as partagée avec le reste du groupe, il est maintenant temps de célébrer les personnes qui la mettent en place. Ça peut être de remettre un objet après un match EN SOULIGNANT le lien avec la vision que tu as partagé à ton équipe. L'idée est de s'assurer que tout le monde voit que la nouvelle vision est en train de se mettre en place.
Une culture, c’est comme un éléphant, ça se mange une bouchée à la fois. C'est un changement graduel qui s'exerce action par action, et personne par personne. Votre mandat est donc d'instiguer le changement en influençant et en responsabilisant les premiers suiveurs. La suite est hors de votre contrôle et - aussi bien s'y habituer parce que ce ne sera pas la dernière fois que vous n’aurez pas le contrôle si vous venez tout juste de devenir un entraineur-chef.
Votre premier plan
- Créer un défi qui va vous permettre d’observer - sans intervenir - les influenceurs naturels de votre équipe.
- Formuler clairement pourquoi il est primordial de changer dès maintenant, et l’impact que ça l’aura sur le succès individuel et collectif des membres de votre équipe.
- Identifier un comportement exemplaire de votre culture pour ensuite souligner un de ces comportements exemplaires à chaque semaine.
Références
- Bloom, S. (2022). How to Change Your Life in 1 Year. https://www.sahilbloom.com/newsletter/how-to-change-your-life-in-1-year
- Logan, D., King, J., & Fischer-Wright, H. (2008). Tribal leadership. Tantor Media, Incorporated.
- Kotter, J.P. (1996), Leading Change, Harvard Business School Press, Boston, MA.
- Sinek, S. (2019). The infinite game. Penguin.